En France comme en Europe, l’intégration des principes de l’économie circulaire dans l’aménagement se développe, générant des projets expérimentaux qui mobilisent une diversité d’acteurs et bousculent les codes classiques du monde des déchets, des matériaux et de la construction.
Pour soutenir l’économie circulaire dans ce type de projets, divers leviers existent : des chartes (développement durable, chantier vert), des labels nationaux (EcoQuartier et 2EC du Cerema) et régionaux (contrat rural (CoR), démarche HQE et QIE) ainsi que des référentiels d’aménagement. Ces leviers créent un contexte favorable au développement de l’aménagement circulaire en permettant d’accéder à des financements, des soutiens techniques ou encore des formations.
C’est ce que rappelle la toute dernière édition des carnets pratiques de l’Institut Paris Région consacrée à cette thématique. Ces carnets étudient différentes méthodes pour produire et gérer des territoires « circulaires » et dressent un panorama de projets et de politiques à toutes les échelles, dont l’objectif est de réduire l’extraction et le rejet des ressources mobilisées pour l’aménagement des territoires.
Le réemploi constitue un premier moyen pour aborder l’économie circulaire dans l’aménagement. Il se développe autour de projets expérimentaux qui cassent les codes classiques de la construction. L’utilisation de matériaux bio ou géosourcés comme le bois ou la terre est un autre levier pour aller vers un aménagement circulaire, qui permet de tendre vers un « mix matériaux » moins carboné et plus économe en ressources.
L’Institut Paris Région met en avant certains projets emblématiques dont le Pulse fait partie. Cet immeuble de bureaux d’une superficie de 30 000 m² est implanté à Saint-Denis (93), dans une zone en pleine reconversion. Livré début 2019 par le promoteur Icade (architecte : BFV Architectes, AMO réemploi : Mobius Réemploi), il a vocation à être utilisé par le comité d’organisation des Jeux Olympiques 2024.
Il s’agit du plus grand immeuble de bureaux à recevoir le label pilote bâtiment bas carbone (BBCA). Une structure mixte (noyaux en béton, poteaux et poutres / planchers en bois) a été retenue pour sa construction.
Le réemploi est un axe majeur du projet. L’intégralité des dalles de faux planchers techniques (environ 22 000 m2), ainsi qu’une partie des mains courantes, sont issues de chantiers de démolition en région parisienne (Issy-les-Moulineaux / Paris / Colombes…). Des éléments de serrurerie pour les garde-corps ont également été valorisés dans le projet.
Au-delà de l’usage du bois, un ciment « moins carboné », utilisant des laitiers de haut fourneau en remplacement du clinker, complète la démarche d’économie circulaire du projet. Les isolants intérieurs sont conçus à 85 % en coton recyclé, à partir de vêtements usés et transformés. Une moquette recyclée a aussi été mise en œuvre.
Le bâtiment a contribué à lever les barrières techniques et assurantielles qui se posent pour le réemploi. Mobius a reconditionné et fourni les dalles de faux planchers, contribuant à la reconnaissance sur le plan réglementaire de cette filière émergente. Les dalles ont les mêmes propriétés techniques et assurantielles qu’un produit neuf et affichent un bilan carbone inférieur de 89 % (8,68 vs 76,2 kgeqCO2/m2).
Au sein de l’écoquartier des Docks de Ris, à Ris-Orangis (91), le programme Quai de la Borde a été livré en octobre 2016. Il se compose de 140 logements sociaux construits en bois massif CLT (bois lamellé contre-croisé), utilisé dans les plafonds, les plateaux et les murs.
Porté par l’aménageur Grand Paris Aménagement, le promoteur Promicea (qui utilise la technologie de son actionnaire Woodeum), l’architecte Wilmotte & Associés et le bailleur social Immobilière F, le projet s’inscrit dans le cadre de la reconversion de la friche des Docks des Alcools en écoquartier.
Labellisés bâtiments bas carbone (BBCA), les immeubles utilisent à 70 % des énergies renouvelables, via un réseau de chaleur s’appuyant sur les ressources géothermiques et la biomasse, pour les besoins en chauffage et en eau chaude sanitaire.
En outre, grâce au bois massif CLT, les bâtiments vont stocker plus de dioxyde de carbone qu’ils ne vont en émettre : on estime qu’un mètre cube de bois utilisé dans le bâtiment représente une tonne de dioxyde de carbone stockée, à laquelle s’ajoute 0,7 tonne de CO2 économisée en moyenne par substitution à un autre matériau.
Le bois massif devrait ainsi permettre au Quai de la Borde de stocker 880 tonnes de CO2, soit l’équivalent des émissions de carbone liées aux besoins de chauffage des trois bâtiments pendant 88 ans.